Parti Pirate - Quand l'ivresse écologiste fait parler la « sobriété numérique »

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Quand l'ivresse écologiste fait parler la « sobriété numérique »

Publié le 26/09/2021
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Le réchauffement climatique s’impose à nous par ses graves conséquences et par les efforts que nous devons réaliser pour décarboner les activités humaines. Et au-delà du CO2, réduire l’impact de nos activités sur l’environnement devient crucial si nous voulons que notre planète puisse continuer à nous accueillir.

De leur côté, les objets et usages du numérique sont aujourd’hui omniprésents et utiles à tout le monde, en croissance dans nos sociétés et vecteurs majeurs d’évolution de ces dernières.

L'idée de se préoccuper de leur impact est donc apparue plutôt naturellement avec ce poids croissant.

C'est la raison pour laquelle, depuis quelques années, nous voyons fleurir des évaluations d’impact du numérique dont découlent des propositions de mesures visant à décarboner notre économie. Et c’est là qu’à notre sens, le bât blesse trop souvent en France.

Un débat faussé

Le long débat sur la pertinence de déployer la 5G, ponctué de demandes de moratoires, ou les injonctions à réduire notre consommation de vidéos en ligne, se nourrissent d’études scientifiques factuelles, mais aussi de rapports médiatisés, les interprétant à leur manière, relevant plutôt de l’opinion.

Si le débat public doit bien entendu se nourrir de faits vérifiables comme d’opinions, il nous semble cependant important de clairement différencier les deux.

Il en va ainsi de certaines affirmations sur la consommation électrique supplémentaire induite par la téléphonie 5G, ou sur l’impact environnemental élevé de la vidéo en ligne, ou encore sur celui du courrier électronique. Ces affirmations sont trop souvent fondées sur des hypothèses et des choix arbitraires qui aboutissent à exagérer fortement l’impact réel du numérique par méconnaissance des mécanismes.

Impact environnemental et externalités positives

L'accès à la connaissance à des degrés sans précédent, l'exercice de la libre expression par le plus grand nombre, l'horizontalité de la communication, l'accès facilité aux services de mobilité, le partage d'informations, de photos et de vidéos, les échanges instantanés entre les personnes, autant d'exemples concrets de ce que le numérique apporte aujourd'hui à notre société.

Certaines de ces avancées majeures ont un coût et nous devons conserver un regard lucide sur l’empreinte future du numérique.

D'autres, en revanche, permettent, par le transfert vers le numérique d'activités plus polluantes, d'épargner l'environnement. Nous pensons par exemple au télétravail, si indispensable aujourd'hui à notre société. Une étude de l'Ademe1 estime d'ailleurs son impact comme étant globalement positif sur l'environnement.

Quoi qu'il en soit, sans considérer les externalités positives, l'empreinte du numérique représenterait aujourd'hui de 2 à 6 % de la consommation d’énergie mondiale, soit environ 7 % de la consommation d'électricité.

Les sources que nous avons trouvées pour confirmer ces chiffres ne semblent pas s'appuyer sur des études fiables.2 Nous recommandons donc de les consulter avec prudence et nous cherchons encore de quoi confirmer les affirmations concernant l'empreinte réelle du numérique sur la consommation d'énergie mondiale.

L'impact carbone lié au numérique dépend notamment de celui du kilowattheure électrique, critère sur lequel la France est très bien placée grâce à son énergie nucléaire et hydroélectrique.

Cet impact dépend aussi de sa démocratisation au sein de la population. Par exemple, une infrastructure de réseau mobile ou fixe aura un impact proportionnel à sa couverture géographique ainsi qu'aux usages et au taux d’équipement de la population.

Cet impact dépend enfin -et surtout- de la fabrication des équipements : ordinateur, téléphone, box Internet, infrastructure des réseaux et des centres de données (datacenters). Cet impact dépasse alors la seule question du CO2, puisqu'on parle de ressources en eau, métaux rares, etc.

Il semble particulièrement opportun de rappeler dès à présent qu'Internet avait été déployé, à l'origine, pour permettre à des universités la mutualisation des grands centres informatiques à travers le continent américain, permettant des économies sensibles de matériel.

Des injonctions contradictoires

Beaucoup parmi nous ont déjà entendu les injonctions à regarder moins de vidéos en ligne, à nettoyer sa boîte de courrier électronique, à limiter le nombre et la taille des courriels envoyés, à ne pas recharger son téléphone aux heures de surcharge du réseau électrique, etc.

Ces injonctions reposent, pour beaucoup d'entre elles, sur des évaluations surestimées ou anciennes, parfois même complètement erronées.

Savez-vous qu'une charge complète de votre téléphone mobile ne représente qu'environ 2 heures d'allumage d'une ampoule basse consommation ?

Nous donner une image très exagérée de l'impact des usages élémentaires du numérique aboutit à nous suggérer, parfois sciemment pour "mobiliser", des efforts inutiles de sobriété.

Pire, ces évaluations pourraient très prochainement servir de justification à des évolutions de politiques publiques empêchant des usages utiles à la société, y compris ceux contribuant à protéger l’environnement.

Ainsi, exagérer l’impact de la vidéo en ligne décourage son usage pour éviter des déplacement polluants, parfois à l’autre bout du monde, et encourage le recours à des médias non dématérialisés, donc potentiellement polluants, comme le support DVD. De même, considérer que le courrier électronique gaspille de l'énergie équivaut à lui faire préférer le papier, en contradiction avec des injonctions à ne pas imprimer nos documents électroniques.

Ici encore, nous nous référons à une source chimérique3 pour appuyer notre argumentaire. Notre objectif étant de pointer le nombre conséquents d'études fallacieuses qui circulent entre les mains des personnes qui se revendiquent de la lutte pour une sobriété numérique, nous ne pouvons faire autrement que de présenter les sources sur lesquelles ces argumentaires s'appuient.

En revanche, l'utilité de conserver le plus longtemps possible nos appareils électroniques en évitant de les changer inconsidérément et en favorisant leur réparation fait consensus.

Mais alors, que faire ?

Pour nous, Pirates, la connaissance scientifique est un élément essentiel guidant nos réflexions et nos propositions. Les moyens de partage des connaissances dont nous disposons désormais avec les réseaux facilitent cette démarche.

Aux décisions fondées trop largement sur les croyances ou la conviction intime, nous préférons celles s’appuyant sur des éléments de connaissances scientifiques et technologiques. Et dans cette approche qui nous réunit, nous éprouvons aujourd'hui une immense solitude.

Ainsi, le Parti Pirate a été le seul parti politique français soutenant le déploiement de la 5G dans un contexte où des craintes irrationnelles ont dominé le débat, comme c’est trop souvent le cas pour les sujets qui touchent à la technologie.

Compter sur le numérique

Notre monde est soumis à des contraintes environnementales fortes, et nous avons la conviction qu’au lieu de nous éloigner du but, le numérique est un atout fantastique pour nous assister dans la transition écologique, par exemple en améliorant l’efficacité énergétique de nos sociétés. Il facilite la collecte d’informations, permet la connaissance pointue des impacts et gaspillages et aide à l’analyse scientifique. Dans cette urgente entreprise, le numérique facilite et accélère la coordination mondiale, nécessaire, des ressources et de la recherche, comme il l'a démontré lors de l'épidémie.

Par l’analyse d’images satellites, la collecte de données et leur traitement, le numérique a été et continue d’être un élément essentiel pour prendre conscience des problèmes environnementaux, et notamment du réchauffement climatique, en analyser les causes et évaluer les stratégies pour y répondre. Il est aujourd’hui aussi un vecteur de communication privilégié pour élaborer des solutions globales et pour communiquer aussi largement que possible les efforts à réaliser. Il est, en outre, un auxiliaire précieux pour mettre ces solutions en pratique.

Peut-on croire qu’en mettant la France en marge du numérique, en le bridant inconsidérément, notre pays serait un lanceur d’alerte et un précurseur vite imité ?

En agissant ainsi, la France ne se rendrait-elle pas plutôt inaudible et ridicule ?

Nous constatons aujourd'hui qu'il n'existe pas d'évaluation environnementale exhaustive sur le numérique et que les quelques rares entités qui monopolisent l'espace médiatique empêchent tout débat contradictoire.

Cela aboutit à biaiser le débat public par des jeux d'influence plutôt que des arguments de fond. Pire, cela risque d'entraîner l'action publique dans des impasses ou des voies contre-productives, en imposant indûment au numérique des restrictions stériles.

Nous, Pirates, proposons, en cohérence avec notre programme, de développer le partage et la transparence des connaissances, des données, des mesures, des outils et des meilleures pratiques concernant les infrastructures et services numériques, pour les producteurs comme pour les utilisateurs.

Nous appelons les spécialistes des professions du numérique à se joindre à ces analyses. Leur participation est aujourd'hui plus que jamais indispensable pour apporter les éléments techniques concrets permettant d'éclairer les études afin d'orienter utilement nos efforts.